Critique de l'album
- Mr. Machine (2011)

le 01/04/2012 par olivier

Brandt Brauer Frick est un trio composé de deux producteurs techno (Brandt et Brauer) et d’un étudiant en musique moderne et classique (Frick), qui ont décidé de mettre en commun leurs talents afin d’essayer de donner un souffle nouveau à la musique électronique allemande. Mr. Machine sort en 2011, une année après You Make Me Real, album qui a eu un retentissement certain sur internet et dans les journaux, spécialisés ou non. Il suffit en effet de jeter un coup d’oeil au dossier de presse qu’on trouve sur le site du groupe pour s’en rendre compte: les compositions de Brandt Brauer Frick ont visiblement été très bien accueillies dans le milieu techno, electro et house, mais aussi par un public d’horizons musicaux variés, du jazz à la musique classique.

Il faut dire que les trois gaillards ont développé un concept simple, mais particulièrement original et ambitieux: faire de la techno en ayant uniquement recours à des instruments acoustiques, à l’exception d’un synthétiseur Moog, seul instrument électronique employé par le groupe, mais tellement ancien qu’on pourrait presque le taxer de « classique » (c’est tout de même avec un de ces machins que Beethoven et Rossini ont été revisités pour la bande originale d’Orange Mécanique). Mr. Machine est un peu la mise en application totale de cette idée, puisque le trio se fait cette fois accompagner  par un ensemble de dix musiciens jouant d’instruments à vents, à corde et à percussion, pour un résultat proche de ce qu’on pourrait appeler de la « techno acoustique de chambre », augmentée de rythmiques et harmonies jazz.

L’album est à mon avis une parfaite réussite, qui parvient à fusionner des genres en n’en détériorant jamais les essences respectives. Les morceaux, souvent assez longs, se dévoilent de façon progressive, laissant une large, via le piano, à des structures « modulaires » que Nik Bärtsch n’aurait sans doute pas reniées, et qui impriment à l’ensemble un rythme subtil tout en participant à un effet techno des plus réjouissants. Les percussions, dont le mixage excellent de l’album parvient à faire s’exprimer toutes les nuances, tissent un réseau complexe sur lequel viennent s’accrocher sans heurt de nombreux instruments à vent et à cordes (harpe, baryton, violon, etc.), oscillant constamment entre explosions harmoniques et manifestations isolées, toujours pertinentes, jamais en trop. Ainsi, « Pretend », troisième morceau de l’album, fonctionne-t-il sur ce mode de progression, pour se terminer en un véritable chef-d’oeuvre de composition « classique » que la mélodie chantée d’Emika vient, à intervalle régulier, altérer d’accents « house » – et pas de vocoder pour une fois. « Bop », qui vient juste avant dans la tracklist, prolonge (ou rénove?) l’excellent « Bop » présent sur You Make Me Real et son minimalisme terriblement rythmique et efficace, tandis qu’au seuil de la parodie, « Mi Corazon » rappelle les lignes mélodiques basiques qu’on entend trop souvent (quatre notes et on fait un morceau) en house ou en techno, mais c’est au baryton et avec talent que Brandt Brauer Frick revisite le genre. Enfin, pour terminer l’aperçu, je recommanderais à tous ceux qui aiment le jazz d’E.S.T. d’écouter « You Make Me Real », vous y apprécierez, peut-être comme moi, les lignes de piano magnifiquement enlevées et le travail hallucinant sur les percussions.

Pour ceux que ça intéresse, Brand Brauer Frick se produit deux fois en Suisse, très prochainement: le 6 avril au club Bonsoir de Bern et le 7 avril à l’Electron Festival de Genève…

 

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3 commentaires

  1. NougatRillettes dit :

    Le clip officiel de Pretend est très bien au passage, et bénéficie d’un enregistrement de meilleure qualité qui permet de bien mieux apprécier le morceau : http://youtu.be/aBPEbF_u0cY

    • victor dit :

      Yep, il est excellent ce clip. Et entre l’audio d’une vidéo 240p et 720p, y’a vraiment pas photo !

      • NougatRillettes dit :

        Euh, les deux sont passables en 1080 hein. Le seul inconvénient du clip c’est qu’il ne dure « que » 5 minutes alors que la version complète de la chanson est de 7:00.
        Par ailleurs j’aime beaucoup ce que fais Emika avec notamment : http://youtu.be/Tpep1m-h_k4