Critique de l'album
- FACT 321 (2012)

le 23/10/2012 par benoît

De deux choses l’une. « New York Transit Authority » ça en jette comme nom, même lorsqu’on vient de Bristol. Que Fact ait sorti 300 tapes depuis 2009 chacune réalisée par un artiste ou DJ électronique à la pointe du moment, ce n’est pas rien non plus. 3, 2, 1. L’attrait ici est multiple: d’abord sonique, parce que c’est ultime à ce niveau là. Le style et la classe, parce que c’est puriste, élégant, racé. L’atmosphère enfin, cloîtrée et ouverte à la fois, oppressante et déchaînée. NYTA utilise avec goût une rafale de sons lourds et puissants, de wobbles qui pourraient décoller les oreilles de ton jeune voisin légèrement ennuyant qui roule en Honda, mais ces basses rappellent ici plutôt quelques noirs sous-terrains d’une pulsante discothèque où les murs semblent prendre vie. Enfin, ça vibre. Mais pas seulement, très loin de là. La musique avance comme une locomotive, massive, tumultueuse, et avec toujours au centre une ligne, que dis-je un câble, un énorme câble funky, un funk de 210 kilos. L’origine de tout cela est dubstep mais avec des rythmes oscillants, décalés, ici parfaitement orchestrés, avec un sens de la musique à mon avis incroyable, qui aurait de quoi faire taire nombre de rockistes s’ils écoutaient de l’UK Bass (qui rime avec tabasse).
Le mix, qui touche l’heure, commence en trombe avec le hit Off the Traxx (I must catch that train), et c’est de la belle matière mais de toute façon ça ne discontinue pas, moyennant quelques superbes transitions. L’avantage avec le talent, c’est que quand on l’a, les questions ne se posent plus. Plusieurs samples et voix viennent se poser au bon moment tandis que la machine continue de rouler ses mécaniques. On peut alors tendre l’oreille pour des sons plus anciens, plus house (peu après la moitié par exemple) qui alternent avec des sons plus agressifs où l’on sent le passage du grime. On peut se laisser aller à poser son dos sur un siège et juste sentir le souffle. C’est beau, froid, métallique, mais en musique électronique à travers le robot il y a toujours l’âme. L’homunculus en l’occurence s’appelle Mensah Anderson. « It’s a shame that you can’t see through the rain ». Et la cascade d’eau de retomber sur tes épaules, sans faiblir, mais c’est un flux qui te baigne et te gonfle plutôt qu’il ne te casse (un large défaut des productions basées sur les breaks et la complexité à mon avis).
Oui, à la fin il y’a quelque chose de propulsant, de vaporisant, de pulvérisant pour l’esprit et les sens. On peut sentir les courants d’air à travers ses membres. Je garde l’image du train pour le mouvement et le transport, après tout c’est le voeu du projet. « Let me be your conductor » instructe-t-il et cela ressemble plus à un ordre tant on ne nous laisse pas grand chose à faire. NYTA impressionne par sa prise de contrôle, qui en fait de train, pourrait bien être celle de ton être. Le temps d’une heure, en passant à travers toutes les gares, avec une fin grandiose en libre course dédiée cette fois à l’héritage premier, originel et pré-historique: la disco. Et preuve que les DJ ne sont pas aussi sérieux que leur perfectionnisme et efficacité pourraient laisser croise, même un solo de guitare, histoire de coupler un WTF final à la maestria totale de ce mix phénoménal.

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