le 07/02/2012 par olivier
Par les temps qui courent, pour éviter de se transformer en un sosie de Mister Freeze, eh bien il faut s’habiller. Mettre des bas-culottes, pas? enfiler une cagoule, des guêtres, marcher vite aussi, dans l’idée que le sang ne gèle pas instantanément dans les guiboles, prendre avec soi un thermos de thé cynorhodon. Sauf qu’au final, avec la multiplication des couches et du matos antigel, on se retrouve aussi à l’aise dans ses frusques que Jean-Claude Van Damme pourrait l’être dans un tutu. Et tout ça, c’est sans compter la goutte au tarin qu’on sent même plus tant le dit pif n’est plus fonctionnel, les soucis pour téléphoner, les gamelles en puissance parce qu’on vit toute l’année avec une confiance absolue en de simples espadrilles, et les vilaines buées que subissent les binoclards d’entre nous pour lesquels, malgré les avancées technologiques, on n’a toujours pas trouvé de solution efficace. Enfin bref, le dehors, c’est un peu un combat perdu d’avance.
Perfect Darkness, sorti fin 2011 chez Ninja Tune, est la solution à ces problèmes thermiques, le feu allumé dans l’air polaire, le plaid magique qui vous fournira la chaleur nécessaire pour braver ce mois de février dont le fond de l’air s’avère salement frais. Ce cinquième album de Fink, groupe formé autour de Fin Greenall, n’a pourtant rien à voir avec les productions habituelles du label anglais; on est loin en effet des expérimentations d’Amon Tobin, du break-beat engagé de Coldcut ou de l’electronica ambient de Bonobo, puisque c’est bien d’un mélange de folk, de blues et de soul dont il s’agit. Le tout s’écoute donc plutôt, vous vous en doutez, chez vous que dans le club du coin à 100 db, et mettra, j’en suis convaincu, un peu de baume à vos engelures, lorsque vous rentrerez chez vous transi par un trajet à pied de 10 minutes. La voix de Fin, chaleureuse et légèrement éraillée, a ce pouvoir rare d’entretenir une constante flamme à travers les morceaux, s’avivant parfois dans les quelques envolées rythmiques qui ponctuent l’ensemble (dans la première moitié du bien nommé « Fear is like Fire » par exemple), s’éteignant presque lorsque ne subsistent que quelques accords d’une guitare à peine grattée, mais restant toujours enivrante, alanguie, dans ce constant va et vient auquel elle se prête avec une classe rarement égalée ces derniers temps. Rien de particulièrement innovant, certes, mais une facilité à la composition déconcertante, qui avait déjà impressionné dans Biscuits for Breakfast et dans Sort of Revolution. Dans la foulée cependant, on notera tout de même les influences dub dans certaines lignes de batterie et dans l’aspect « boucle » de certains riffs acoustiques et électriques (« Honesty » et surtout « Warm Shadow » mon morceau préféré), choix rythmiques qui témoignent de l’ascendance électro du gaillard, mais ne portent en rien préjudice à l’ensemble, bien au contraire. Tout ça participe à cet effet « itératif » qui domine l’album, à ce petit goût de reviens-y, à cette atmosphère tout aussi bien brise-glace que mélancolique, et qui pousseront probablement ceux qui ont apprécié le tout à se lancer dans une ré-exploration de ces titres transportants, en faisant cette fois attention aux textes de ce songwriter capable de faire passer des termes vulgaires pour de la licence poétique.
« You’re like a fuckin’ rainbow
Just let me ravel in your bloom »
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